Trafics, dépôts sauvages : la France croule sous les ordures !
La France produit près de 340 millions de tonnes de déchets par an, un des volumes les plus élevés d’Europe. En marge des filières légales, 35 000 dépôts sauvages prolifèrent sur tout le territoire. Et de lucratifs trafics de déchets s’organisent, faisant peser des risques sur notre environnement et notre santé. À Forbach, en Moselle, la forêt se transforme en décharge. À quelques kilomètres de la frontière allemande, nos caméras ont filmé des automobilistes qui déchargent en pleine nature des gravats, des appareils sanitaires hors d’usage et surtout des pneus usés. Les marquages relevés sur de nombreux pneus attestent d’un usage outre-Rhin. Car en Allemagne, leur reprise est encadrée et facturée ; côté français, l’amende théorique (jusqu’à 1 500 euros) dissuade peu. Résultat : le ramassage de ces tonnes de déchets est assuré par des bénévoles épuisés, écœurés de voir les sols pollués. À Périgueux, en Dordogne, les habitants craquent ! Ici, il faut déposer soi-même ses ordures ménagères et payer à chaque dépôt de sac. Mais attention, pas plus d’un par semaine ! La carte annuelle (272 euros) inclut 52 dépôts ; au-delà, déposer tout sac supplémentaire coûte près de 6 euros. Résultat : une partie des habitants refuse de payer et détourne des poubelles de rue, pour le plus grand bonheur des rats qui prolifèrent en ville. Au bout du compte, ce nouveau mode de collecte alourdit la facture des habitants, comme celle de la municipalité qui a dû embaucher une équipe de dératisation et affecter deux personnes à la chasse aux contrevenants ! En Provence, une propriété agricole s’est transformée en plaque tournante de déchets de chantier : tuiles, ferraille, plastiques. Le stock dépasse le millier de tonnes sur des dizaines d’hectares. Notre enquête a permis de mettre au jour un incroyable trafic, organisé grâce à la fraude de salariés indélicats d’un grand opérateur du retraitement. Car le trafic d’ordures rapporte beaucoup d’argent. Aux abords du Luxembourg et de l’Allemagne, les douanes traquent les remorques de « matières valorisables ». En réalité, ce sont bien souvent des mélanges de déchets illégaux. Les douaniers font souvent un « carton plein ». Car au Luxembourg, le traitement des déchets est bien plus onéreux qu’au sud de l’Europe. La France sert de point de passage, quand elle n’est pas la destination finale. Les amendes, de 150 à près de 900 euros, ne suffisent pas à dissuader les contrevenants. Mais elles gênent les donneurs d’ordre, car c’est retour à l’envoyeur : les camions et leur chargement doivent faire immédiatement demi-tour ! Dépôts sauvages, déchetteries, usines de recyclage : notre enquête révèle les abus et les risques sanitaires que le trafic de déchets engendre.